mon cher blog, et vous qui nous lisez si gentiment depuis trois ans, peut-être,
tu as trois ans. te voilà un grand beau blog bien fort et en bonne santé. et moi, qui suis né le même jour que toi, j'en ai — j'ose à peine le dire —, tiens, je ne le dirai justement pas — mais j'ai quelques années de plus que toi.
que puis-je te souhaiter en un jour pareil ? eh bien, pas ce que les gens qui m'aiment me souhaitent normalement ! je te souhaite, moi, de devenir bien grassouillet, le plus dodu, le plus replet, rebondi et obèse de tous les sites. après tout, à trois ans, songe un peu, il est encore de ton âge d'être potelé.
je te souhaite de continuer à te nourrir de documents, de photos, de dessins, parce que je crois que plus tu t'en repais, plus tu fais plaisir à quelques personnes qui me font la grâce d'aimer bien mon travail.
et moi, je me souhaite de pouvoir te nourrir encore longtemps de la même manière — et il n'y a pas de raison qu'il en aille autrement : contrairement à toi, je fais attention à mon embonpoint, et n'en ai donc pas — or, ce qui est bon pour les blogs ne l'est pas forcément pour les êtres humains.
je suis ravi, vraiment, que tu te portes si bien — et moi aussi, je tiens à te le dire.
et puisque mes considérations portent toutes sur le physique, profitons-en pour rappeler ici qu'un anniversaire sans gâteau n'en serait pas un. aussi vais-je donner, nulle part ailleurs qu'ici et pas plus tard que maintenant, la recette d'un gâteau très simple que j'aime beaucoup. je crois que l'origine en est américaine (parce que j'en ai entendu parler dans des films ou des livres américains, et parce que j'en ai mangé à disneyland). personnellement, j'en raffole, et je suggère aux aimables amis qui nous suivent et dont j'ai parlé plus haut de se lancer sans tarder davantage dans la confection dudit gâteau. ainsi, ils auront un peu l'impression de fêter cet anniversaire avec nous pour de bon.
comment ? tu me dis qu'un blog ne se nourrit pas de gâteaux, que je t'ai moi-même rappelé que seuls les textes, les dessins et les photos font ton bonheur ? eh bien, sois heureux, puisqu'en voici un, de texte !
donc, mes amis, attelons-nous gaiement à la confection de mon gâteau. il s'appelle fort sobrement "gâteau à la carotte".
non, ne poussez pas de hauts cris, ne faites pas "beeeek !" avant d'avoir goûté. la carotte étant sucrée, elle se prête admirablement à la pâtisserie. et puis, c'est un gâteau végétarien, il conviendra par conséquent à tout le monde — même si je vois mal quel genre de gâteau nécessite de la macreuse à pot-au-feu ou des saucisses de francfort.
mais ne nous égarons pas.
le gâteau à la carotte, donc :
pour commencer, assurez-vous que la cuisine est bien dégagée, les enfants et la grand-mère à l'abri dans la remise du jardin, par exemple, car vous allez devoir vous munir d'un couteau et en jouer une ou deux fois dans cette affaire. rien de véritablement périlleux en soi, mais je ne sais rien de votre attitude à jouer du coutelas, admettez-le.
vous voilà donc dans la cuisine, seul(e). profitez-en pour siffler le petit verre de chardonnay que vous déconseille votre imbécile de médecin, pour fumer la cigarette interdite ou tout simplement consulter la liste des chevaux partant dans la onzième à auteuil cet après-midi — toutes choses que nous appelons "le privilège du cuisinier".
quand vous commencez à constater que le temps file décidément bien vite, décidez de vous atteler à la confection proprement dite du gâteau.
tâchez de réunir autour de vous les ingrédients suivants :
— 250 grammes de carottes (les carottes des sables sont les meilleures, et de loin)
— 125 grammes de sucre roux
— 2 œufs
— 125 grammes de beurre fondu
— 200 grammes de farine
— 1 sachet de levure chimique
— 1/2 cuiller à café de cannelle
avez-vous réussi à dénicher tout ça ? parfait. attaquons-nous hardiment à la fabrication du gâteau, après avoir retâté de ce petit chardonnay et fumé une deuxième cigarette — le toubib n'en saura rien.
d'abord, fouettez avec entrain les œufs avec le sucre. le mélange va bientôt doubler de volume et devenir mousseux. quand vous serez revenu de votre surprise, ajoutez peu à peu la farine (peu à peu, d'accord, mais sans y passer la journée, tout de même) et le beurre fondu tout en continuant de fouetter dans la bonne humeur, puis la cannelle, la levure, et enfin — c'est assez important, ne l'oubliez pas — les carottes râpées (j'insiste sur le fait qu'elles doivent être râpées ; autrement, ce serait le gâteau qui serait râpé) sans arrêter de fouetter, de fouetter et de fouetter. pour ceux d'entre vous qui ont ce penchant morbide d'aimer fouetter, ils seront à la noce, là.
ici, je me dois d'insérer un aparté : certaines personnes, que je ne nommerai pas et dont j'ignore tout, au reste, n'hésitent pas à ajouter à ce mélange 60 grammes de noix concassées. à ce train-là, je suppose qu'on peut aussi mettre des pacanes, ou noix de pécan (il me semble que ce serait plus dans la note américaine que des bêtes noix de chez nous). ça, c'est une affaire de goût, et moi, je n'en mets pas.
et puisque j'en suis à vous causer en aparté, je vous dirais bien aussi que 125 grammes de sucre, ça fait beaucoup de sucre. à ceux qui, comme moi, aiment le sucre, mais pas au point de vouloir se transformer en sucre, je suggérerai de se contenter de 100 grammes. ce sera bien assez poisseux comme ça.
bon, à présent, vous pouvez cesser de fouetter (toutes les bonnes choses ont une fin) et verser le tout dans un plat à tarte d'une trentaine de centimètres (le mien en fait 27, mais il n'est pas comme tout le monde) — beurré, cela va sans dire. si l'idée de beurrer le plat avec vos petites mains vous dégoûte, n'hésitez pas à aller rechercher la grand-mère dans la remise du jardin. soyez certain qu'en échange de la promesse d'une part de votre gâteau, elle se fera un plaisir de vous beurrer le plat avec diligence.
ah, je dois vous dire à présent que certaines personnes (celles dont j'ai parlé plus haut, sans doute) préfèrent faire cuire le mélange dans un moule à cake. grand bien leur fasse, vous dirai-je, mais quant à moi, j'aime mieux les choses quand elles ont la forme d'une tarte. c'est ainsi, et ça n'est pas à mon âge que je vais me refaire.
alors, y êtes-vous ? le plat à tarte est-il beurré ? le mélange est-il bien dedans ? il ne vous reste plus qu'à me coller ça au four (170° feront l'affaire) pendant une heure — heure que vous pourrez mettre à profit pour finir la bouteille de chardonnay en fumant la dernière cigarette —, et vous vous trouverez bientôt l'heureux possesseur d'un gâteau aux carottes.
que vous dégusterez, j'en suis sûr, en nous chantant un "joyeux anniversaire", au petit blog et à moi. et nous vous en remercions.
flg.
Cette nouvelle page, il a choisi de la baptiser: UN RAT DANS LA CONTREBASSE. Que se cache-t-il derrière ce titre mystérieux? Les amateurs de Courteline auront vite reconnu la référence, synonyme d'un petit grain de folie... Et en toute logique, son premier texte y parle de musique!